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 Lealynn et Gilnéor, ou pourquoi l’Amour ne doit pas naître..

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Elanora
Phalenopsis
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Phalenopsis
Gros nounours
Phalenopsis


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Lealynn et Gilnéor, ou pourquoi l’Amour ne doit pas naître.. Empty
MessageSujet: Lealynn et Gilnéor, ou pourquoi l’Amour ne doit pas naître..   Lealynn et Gilnéor, ou pourquoi l’Amour ne doit pas naître.. EmptyJeu 22 Déc - 23:10

(Joyeux Noël à tous. Voici un petit cadeau pour les talahs et leurs amis -un peu en avance certes, merci Blizard pour ce crash serveur Wink.
Si vous préférez imprimer ce texte - 19 pages - le fichier word est disponible ici.)


Phalenopsis entra dans la boutique le long des canaux. Elle sentait bon le vieux livre et l’encre fraîche. Le vieil homme assis à l’intérieur regarda l’elfe avec un sourire et, après l’avoir jaugé, il replongea dans sa lecture.
Le druide parcourait les rayons du regard, prenait parfois un livre dans ses mains, l’examinait, puis le reposait. Après quelques minutes de ce manège, le vieil homme interrompit l’elfe :
« Vous recherchez quelque chose de précis ?
- Seulement de quoi m’occuper l’esprit, répondit-il en lui souriant.
- Comment ? Vous n’êtes pas de ces aventuriers toujours pressés qui viennent ici pour chercher tel ou tel titre afin de les apporter à leurs commanditaires sans même les ouvrir ?
- Hum, je pourrais être considéré comme l’un d’eux, mais parfois vient le temps du repos, du corps comme de l’âme. »
Le vieil homme éclata de rire :
« Et bien ! Vous ne ressemblez pourtant pas à un penseur ! Avec votre armure couverte d’entrailles, de marques de morsures, de griffures, vos mains épaisses et puissantes, votre bâton abîmé par l’usage et votre regard de prédateur, je ne l’aurai jamais cru !
-L’apparence est parfois trompeuse…
- Oui, comme vos yeux, bien qu’ils semblent me jauger comme si je pouvais être une proie, je vois au fond d’eux autre chose, comme une profondeur indécelable au premier regard ! Vous avez dû voir et vivre de nombreux malheurs et déceptions pour qu’ils soient si tristes.
- C’est pourquoi un bon livre pourrait me changer les idées, m’offrir une chance d’oublier, pour quelques instants, la cruauté de ce monde et ses habitants.
- Oh ! Si vous en avez le temps, prenez un siège, mettez-vous à votre aise, je vais vous trouver quelque chose à lire et, éventuellement, vous apporter quelque chose à boire et à grignoter.
- J’ai du temps, répondit laconiquement Phalé en déposant sa lourde cape sur le dossier de la chaise…
- C’est une chose que je n’ai pas entendue venant de la bouche d’un elfe depuis que votre peuple a perdu son immortalité ! Cela me ramène presque quelques années en arrière, lorsque je voyageais encore. »
Le druide sourit au vieil homme en s’asseyant tranquillement.
« Alors, je dois avoir ce qu’il vous faut…Où est-il ? C’est un recueil d’anciennes légendes, compilées il y a quelque temps par un inconnu. J’ai trouvé le manuscrit devant ma porte un matin. Après l’avoir lu, je l’ai gardé, ce sont de bien belles histoires… Ah ! Le voici ! »
Il souffla la poussière déposée sur la couverture et donna le livre à Phalenopsis après avoir traversé la pièce. Ce dernier s’installa confortablement et examina le titre gravé sur la couverture : « L’Amour Impossible ». Cela commençait bien…


Livre I
Lealynn et Gilnéor, ou pourquoi l’Amour ne doit pas naître entre les elfes et les humains.


Le martèlement des sabots sur le sol était étourdissant. Les cavaliers étaient resplendissants dans leurs armures complètes qui brillaient au soleil. Il y avait là une vingtaine de chevaux et une dizaine de chariots. Apercevant un point noir au loin dans la steppe désertique, le cavalier de tête fit bifurquer sa monture. Comme un animal énorme, la troupe suivit le mouvement de son maître. Le train ralentit peu à peu alors qu’ils s’approchèrent du village qui était leur prochaine étape.
C’était un petit regroupement de huttes, habité par des fermiers et des éleveurs sans prétentions. Les enfants et les adultes qui n’étaient pas aux champs regardèrent la troupe pénétrer dans le village avec curiosité et appréhension. L’un des plus jeunes courut immédiatement au champ le plus proche afin d’aller chercher l’Ancien.
Arrivé au centre des habitations, les cavaliers mirent pied à terre comme un seul homme. Le dirigeant regarda avec dédain les quelques clampins qui entouraient son équipage. Ils étaient sales, vêtus pauvrement et semblaient apeurés.
« Toi là ! Va chercher de l’eau et à manger pour nos montures ! » Le pauvre homme à qui il s’adressait répondit d’une voix tremblotante que le point d’eau était à quelques pas de là, mais qu’il ne savait pas quoi donner à manger à ces montures, qu’ils n’étaient que de pauvres paysans…
« Hans, Grub et Stern ! Emmenez boire les chevaux, celui-là va vous montrer où. Et ensuite, emmenez les paître dans le champ à l’entrée du village. »
Il s’adressa ensuite au peu de villageois présents : « Allez me chercher immédiatement tous les habitants de ce village ! J’ai une annonce importante à faire de la part du roi ! »
Les paysans s’éparpillèrent immédiatement pour obéir aux ordres de cet homme étrange, à la voix tonnante et aux armes impressionnantes.

L’Ancien, un petit homme d’à peine un mètre cinquante arriva enfin, précédé par l’enfant qui était allé le chercher.
« Mes Seigneurs ? Je suis Jurnick, le chef de ce village. Nous sommes honorés par votre présence, que pouvons nous faire pour votre satisfaction ? »
Un sourire cruel apparu sur les lèvres du noble : « Amène nous tes plus belles pucelles ! Nous allons nous amuser un peu ! »
L’Ancien devint tout blanc, le visage déformé par la peur alors que la compagnie en arme éclatait de rire : « Je plaisante ! J’ai juste une annonce à faire de la part de votre roi ! »

Peu à peu, tous les villageois arrivèrent. Cela faisait peu, les terres alentour n’étant pas assez riches pour nourrir une grande populace. Les trois cavaliers revinrent avec les chevaux et leur guide, qui avait désormais un grand sourire sur le visage.
« Bien ! Je suis le capitaine Flaurd, de la grande armée du roi Broin. Le roi a besoin de vous ! Oui, ne soyez pas étonnés ! Il a besoin de vous, ou tout du moins de certains d’entre vous. Il a entendu parler d’une terre très riche à l’est de notre beau pays. Si cette terre devenait notre, il pourrait baisser de moitié les impôts qu’il est obligé de vous prendre ! Oui, cette terre est riche à ce point !
Ceux qui voudraient se joindre à son expédition bénéficieraient d’une gloire immortelle !
Je vois aux visages de certains que la gloire n’est pas ce qui les intéressent le plus, sachez que la paye est bonne ! Et que tout soldat du roi est exempté de taxe à la fin de son service !
Oui, vous avez bien entendu !
Quels sont ceux qui voudront manier une épée au service de notre bon roi ? Et qui voudraient aussi pouvoir parader sur de si beaux et si puissants destriers ? Ceux qui veulent se couvrir de gloire et d’or peuvent venir avec nous ! »

L’homme qui avait emmené les trois chevaliers au puits se porta volontaire, ainsi que trois autres habitants. Après avoir pris leurs noms, les cavaliers les firent monter dans un des chariots où ils retrouvèrent des paysans venus d’autres villages. Ensuite, la compagnie se remit en marche jusqu’aux prochains villages où la même scène se répéta à l’identique jusqu’à ce que les chariots soient pleins.

*


Le vieil elfe regardait son élève d’un air las. « Lealynn ! Arrête de rêver et remets toi à ta musique ! » La jeune elfe, âgée à peine de cent cinquante ans, regarda son professeur avec ses yeux plein de douceur. « Maître Praestor, Vous me l’avez dit au moins deux mille fois, il faut que je ne fasse plus qu’une avec cette merveilleuse harpe que vos doigts agiles ont si longtemps et si bien façonnée. Et je m’y applique !
- Je pense plutôt que tu imaginais quel sera le prochain prétendant qui se présentera à ton père ! Encore un de ces guerriers couverts de sang, ou un de ces riches nobles qui te couvrira de cadeaux. Et encore une fois, tu t’intéresseras à lui moins de temps qu’il n’en faut à un renard pour manger une poule. » La belle et jeune elfe fit la grimace quand à l’usage de cette image, elle se voyait plus belle qu’un renard quand même ! Un louve, pourquoi pas, ou une lionne. Mais un renard, quelle horreur ! « Ce qu’il te faudrait, c’est un barde plein d’entrain qui serait capable de retenir ton attention suffisamment longtemps pour pouvoir te plaire ! J’imagine que ton père, bien que fier d’avoir la plus belle femme du monde pour fille, doit souvent s’arracher les cheveux. »
Le carillon de l’arannon, le portail royal, retentit, ce qui signifia pour la blonde étudiante la fin de ce sermon. Après s’être levée et avoir déposé un baiser sur les joues de son précepteur, la jeune elfe sortit dans le jardin, heureuse de pouvoir profiter de la nature et de l’insouciance de la jeunesse.
Le vieux musicien la regarda sortir, un sourire sur les lèvres. Elle jouait bien, presque mieux que lui déjà. Il faudrait parler à son père du réel don de cette jeune femme, qu’elle aille bientôt dans les montagnes du nord, là où lui-même avait été formé. Cela lui permettra de parfaire sa connaissance de la musique, et peut-être même pourrait-elle devenir une des prêtresses de la vie…

*


Gilnéor sursauta quand un trou fit cahoter le chariot. Voilà cinq jours qu’il était assis dans ce tas de bois bringuebalant. Chaque jour, de nouveaux paysans montaient dans ce véhicule. Il se demandait ce qui lui avait pris de s’embarquer dans cette aventure. Il n’était qu’un malheureux fermier. Plus ça allait et plus l’idée de devenir un soldat lui semblait stupide. Et à voir les têtes de ses compagnons d’infortune, tous en étaient arrivés à la même conclusion…

*
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Phalenopsis
Gros nounours
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MessageSujet: Re: Lealynn et Gilnéor, ou pourquoi l’Amour ne doit pas naître..   Lealynn et Gilnéor, ou pourquoi l’Amour ne doit pas naître.. EmptyJeu 22 Déc - 23:11

Dans la clairière ombragée, tout était calme. Quelques rayons de soleil perçaient la couverture des feuillages et tombaient dans l’eau du petit étang. Le clapotis de la fontaine faisait écho aux doux pépiements des oiseaux. Une brise tiède caressait doucement l’herbe verte dont se repaissaient tranquillement une biche et son faon.
Sur la pierre plate au bord de l’eau, Lealynn laissait sécher sa tendre peau en admirant le ballet des poissons. L’elfe était la plus belle créature que la Nature avait vu naître. Lorsque enfin sèche, elle se releva, ses longs cheveux, de la couleur des blés, cascadèrent le long de son corps harmonieux, jusqu’à la naissance de ses reins.
Lentement elle traversa la clairière jusqu’au pommier chargé de fruits. Délicatement elle prit une pomme rouge entre ses doigts finement ciselés. Elle la coupa en trois et alla en offrir une part à la biche et son petit. Elle regarda le faon manger maladroitement le fruit d’un œil tendre, tout en dégustant tranquillement sa part. Puis elle retourna au pommier reprendre la robe qu’elle avait laissée avant de se baigner dans l’eau fraîche.
La tunique blanche mettait en valeur son corps splendide, et c’est avec un sourire sur ses lèvres délicates que la douce quitta ce lieu merveilleux, heureuse que la Nature soit si belle et si sereine.

*


Le fracas des armes se faisait entendre dans l’antique cité. Gilnéor menait désormais ses soldats à la victoire comme il menait, dans ce qui lui semblait une autre vie, ses moutons paître. Les hommes sous son commandement le révéraient et lui faisaient une entière confiance. En dix ans d’armée, il était passé du stade de recrue décevante à celui de commandant exemplaire. Il maniait l’épée mieux que personne et n’hésitait pas à se découvrir pour protéger l’un de ses combattants. Même les trolls, contre qui son roi se battait sans cesse, rêvant de s’approprier leurs richesses, avaient appris à redouter l’étendard au mouton flamboyant.
A son signal, les mages laissèrent échapper leur mana, sous forme de blocs de glace ou de langue de feu, afin de pulvériser la porte de la citadelle située au somment de la ville. Le bois explosa sous le choc et les fiers guerriers de la troisième compagnie chargèrent, Gilnéor à leur tête, dans son armure écarlate.
Le fer rencontra la chair, le sang épais gicla, des membres furent séparés de leur corps. La mort faucha sans distinction trolls et humains. Les coups et les cris pleuvaient, les sorts partaient en tous sens.
L’ancien paysan hurla de rage, intimidant ses adversaires, lorsque ses yeux vifs rencontrèrent ceux de sa cible, le terrible Far Alor’, chef de cette tribu sanguinaire. L’énorme troll, une masse imposante dans les mains, se précipita sur le héros et donna un coup terrible, dont la force aurait fait trembler les murailles de Lordéaron. D’un mouvement souple, Gilnéor courba la tête et releva sa lourde épée d’un mouvement puissant. La lame effilée pénétra sans mal la chair de l’humanoïde qui hurla de douleur. A peine après avoir ôté son arme du ventre de la créature, laissant apparaître ses entrailles, Gilnéor pris sa poignée à deux mains et décapita le troll d’un mouvement circulaire.

*


Le soleil voulait se coucher à l’horizon, mais il n’était pas encore l’heure de dormir pour cet astre magnifique et brillant. Son éclat doré devenait peu à peu orangé, dessinant dans le ciel de splendides arabesques pleines de couleurs.
Le guerrier marchait à travers la forêt. Il suivait un petit sentier presque recouvert de broussailles. Il était content d’avoir troqué sa cotte de maille habituelle contre une tunique de cuir, plus confortable pour cette promenade digestive.
Il s’était suffisamment éloigné du campement pour ne plus entendre les bruits de la troupe. Après le repas, il avait donné les consignes pour la nuit puis s’était éclipsé afin de réfléchir. Il avait été envoyé en éclaireur avant que le roi ne vienne en personne rencontrer le dirigeant des elfes afin de conclure cette alliance. Ce devait être sa dernière mission. Après il pourrait enfin revenir dans son village natal, s’y construire une petite cahute et vivre tranquillement de son potager et de l’élevage de ses moutons. Il s’y marierait avec un petit bout de femme, aurait trois enfants, deux gars et une fille, et n’aurait plus jamais à porter une épée…
Un chant cristallin le fit sortir de sa rêverie. Sur ses gardes, il observa autour de lui et prudemment il s’approcha de la source de la mélodie, sans un bruit.
La vision qui s’offrit à ses yeux le troubla jusque dans son âme et dans son cœur. La plus belle femme qu’il ait jamais vue se tenait là, à dix pas de lui, entourée de petits oiseaux qui virevoltaient autour d’elle. Ses longs cheveux flamboyants dans ce coucher de soleil lui cascadaient jusqu’au bas du dos. Sa robe blanche mettait en valeur son corps fin et délicat. Sa peau semblait de soie.
Longtemps, jusqu’à ce que les volatiles partent se coucher, il resta là, immobile, à la contempler, à admirer sa grâce, à écouter sa voix si pure…

*


Le dernier de ses amis s’était envolé. Elle leur avait chanté sa joie et son bonheur. Ils s’étaient tous montrés enthousiastes quand à sa décision de devenir prêtresse de la vie. Elle allait partir longtemps dans les montagnes du nord, loin au-delà même du village de la musique, pour suivre sa formation, mais elle leur avait promis de se faire d’autres amis à plumes là-bas, qui pourraient porter de ses nouvelles jusqu’à eux. Ainsi, ils retrouveraient dans les chants de leurs congénères sa joie de vivre à elle. Et d’autres oiseaux pourraient lui apporter de leurs nouvelles à eux.
Elle était heureuse d’avoir tant d’amis. Les oiseaux avec leurs pépiements si chantants, les daims avec leurs fourrures si douces, les abeilles avec leurs danses aériennes énigmatiques qui étaient un langage à part dans l’ordre naturel, des fourmis courageuses jusqu’aux ours gourmands de miel, tous les animaux l’aimaient et étaient fiers d’avoir son amitié.

Le craquement d’une branche lui fit tourner la tête. Un être vêtu de cuir l’observait. Ce n’était pas un elfe. Il était trop trapu, trop peu gracieux pour en être un. Mais il ressemblait tout de même un peu à ceux de sa race. Avec son visage dur illuminé par un sourire, cet être semblait particulier. Il tenait une épée courte dans sa main droite mais ne se montrait pas menaçant. Son autre main était appuyée sur le tronc d’un arbre. Il portait les cheveux ras, des cheveux d’un noir corbeau. Ses yeux sans âge semblaient sortir d’un lac. En eux transparaissaient toutes les batailles que cet être avait du vivre. Il émanait de lui une assurance tranquille, une grande confiance en lui-même et en ses capacités.
Son visage, marqué à la tempe par une cicatrice, était recouvert d’une barbe courte. Ses avant- bras étaient couverts de marques, comme si de nombreux coups avaient été parés sans bouclier. Ses muscles saillaient alors qu’il ne faisait aucun effort. Il devait être un combattant.
Elle revint sur ses yeux et plongea dans son âme. C’était un tour qu’elle ne faisait que commencer à pratiquer, mais elle se révélait être aussi douée dans cet art que dans tous les autres. Ce qu’elle y vit la surprit. Il ne rêvait que de calme, et la remerciait silencieusement de ce moment de félicité qu’elle lui avait offert.

*


Gilnéor sourit à la douce créature qu’il avait en face de lui. Il rangea son épée afin d’être certain qu’elle ne se méprenne pas sur ses intentions et fit un pas en avant. Elle lui rendit son sourire. Cela l’encouragea et il fit un deuxième pas, puis un troisième… Il se retrouva face à elle après avoir traversé la clairière. Tout doucement, il s’assit contre le tronc d’arbre à ses côtés.
La regardant dans les yeux, il se mit à chanter. Non pas les chants qu’il avait entendus et hurlés dans les douze dernières années de sa vie mais ceux simples et innocents de son enfance. Il chanta maladroitement le premier, sa voix étant peu habituée à de tels exercices. Alors il le rechanta, une deuxième fois, d’une voix plus calme, plus posée.
A sa grande surprise l’amie des oiseaux l’accompagna, faisant de cette berceuse une merveilleuse et incroyable mélodie. Puis elle commença une chanson, une des siennes. Il l’écouta attentivement, et à la troisième répétition, il se lança timidement pour essayer de lui rendre la pareille.
Elle éclata de rire devant tant de maladresse. Il rit aussi, de lui-même et de sa si piteuse prestation. Elle le regarda avec tendresse et lui déposa un baiser sur le front. Le rouge lui monta au visage, il se mordit la langue afin de ne pas céder à la passion qui l’envahissait.
Enhardie, elle caressa de ses doigts fins et gracieux la peau tannée par le soleil du guerrier, son front d’abord, puis sa barbe légère. Elle était curieuse de cet être qui n’était pas elfe mais qui était si séduisant, qui éveillait quelque chose dans son cœur, dans son ventre aussi.
Elle se sentait fragile à ses côtés, il se sentait maladroit devant tant de grâce. Ils se regardèrent, les yeux dans les yeux. Sans un mot, leurs lèvres se rencontrèrent, scellant leur destin.
Ils laissèrent leurs sens les diriger, elle ôta sa vielle tunique de cuir, découvrant un torse puissant, couvert de cicatrices. Elle passa lentement ses doigts sur chaque cicatrice, suivant les fins sillons tracés dans la chair.
Lui, dégrafa sa robe, la fit glisser de ses épaules puis le long de son corps, émerveillé. Cette peau était parfaite, il laissa ses mains courir dessus, appréciant la douceur de la chair…

*


Le valet entra doucement dans la chambre du vieux professeur. « Maître Praestor, désolé de vous réveiller, mais l’Arphen Elowan vous fait mander. » Le vieil elfe se leva, se fit aider par son valet pour s’habiller et se rendit aussi vite que possible chez son vieil ami.
Il le trouva dans sa salle de magie, une petite pièce éclairée par un globe qui diffusait de la lumière tamisée. Son ami était assis dans un fauteuil fait de bois de chêne blanc. Ses traits étaient tirés, il semblait très fatigué. La dernière fois que Praestor l’avait vu ainsi, c’était à la naissance de sa fille, quand sa femme était morte en accouchant de l’enfant.
« Ah… Praestor… Rassure-moi, dis moi que Lealynn est tranquillement en train de dormir chez toi, dans ta chambre d’amis.
- Non Elowan… Elle a disparu ?
- Oui, je ne sais où elle est. Même la magie n’a su la retrouver. Quel idiot j’ai été de lui apprendre comment échapper aux sorts de détection.
- Même si tu ne lui avais pas appris, elle l’aurait découvert toute seule… » Praestor s’autorisa un sourire, ce qui redonna un peu de tonus à son ami.
« Tu as raison… Mais où est-elle ?
- Je m’en occupe, tu connais l’admiration que Jillen lui porte. Cet éclaireur saura sans aucun doute la retrouver. Il arriverait à suivre les traces d’un oiseau dans le ciel.
- Merci mon ami… Je suis las… »


*


Klésias, l’aide de camp de Gilnéor s’impatientait. Son chef était parti depuis bien longtemps et n’était toujours pas rentré. Les hommes éveillés, ceux qui montaient la garde, commençaient à montrer des signes de nervosité. Jamais leur chef ne s’était absenté si longtemps dans des terres inconnues. En théorie ils ne risquaient rien dans les terres elfes, mais ces créatures étaient si bizarres. Peut-être était-ce un piège, une manière d’attirer le roi ici afin de décapiter le royaume puis de l’envahir en ne rencontrant qu’une seule résistance.
Le vieil ami du guerrier au mouton flamboyant s’étira. Il observa la forêt pleine de bruits, comme hostile. Le matin n’allait pas tarder. Il serait temps alors d’envoyer des hommes à sa recherche. Peut-être était-ce un test que Gilnéor leur faisait passer. Ou peut-être était-il en danger. Quoi qu’il en soit, il avait laissé des consignes pour la durée de la nuit et il n’aurait pas permis que quiconque les outrepasse.

*
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MessageSujet: Re: Lealynn et Gilnéor, ou pourquoi l’Amour ne doit pas naître..   Lealynn et Gilnéor, ou pourquoi l’Amour ne doit pas naître.. EmptyJeu 22 Déc - 23:12

Jillen était sûrement le meilleur chasseur des armées elfes. Ce jeune combattant était déjà renommé pour son talent à suivre toutes traces, pour son habileté à l’arc et pour son maniement de l’épée. Son cœur était tout entier acquis à la belle Lealynn. Elle ne l’avait jamais regardé comme le regardait les autres femmes, avec cette envie et ce désir dans les yeux, mais c’était elle avec qui il voulait se marier. Peut-être que si il la retrouvait saine et sauve, et la sauvait des griffes d’une quelconque créature malveillante, son père lui donnerait la main de la douce. L’elfe aux cheveux d’argent sourit à cette idée.
Sans un bruit, il se déplaçait dans la forêt, lentement, suivant des traces de la veille, à la recherche du trésor de sa vie.

*


Le soleil, au petit matin, les retrouva endormis dans les bras l’un de l’autre. Gilnéor n’avait jamais connu un repos aussi réparateur, toutes les blessures de son âme semblaient envolées. Lealynn n’avait jamais connu une telle passion, elle avait l’impression de seulement découvrir la vie maintenant.
Un rossignol vint se poser sur lui, le réveillant doucement. Il sautilla sur son torse jusqu’au visage de l’elfe, dont la tête reposait sur ses pectoraux. Il pépia doucement, picorant de son bec les lèvres de la douce. Elle s’éveilla, un sourire aux lèvres, sourire qui s’agrandit encore quand elle réalisa que ce n’était pas un rêve mais bel et bien la réalité qu’elle venait de vivre.
Le guerrier lui passa une main dans les cheveux, ôtant délicatement une mèche qui était devant ses yeux et l’embrassa tendrement. La belle lui rendit tendrement son baiser et se tourna sur le dos, l’attirant sur elle.
Le craquement d’une brindille les fit sursauter. Dans le même temps, des cris se firent entendre au loin, venant du sud.

*


Le sang de Jillen ne fit qu’un tour quand il vit le spectacle qui s’offrait à lui. La douce Lealynn était allongée sur le sol, nue, une créature repoussante sur elle. Cette créature semblait être un elfe, mais était trop trapue, trop peu gracieuse pour en être. Cela devait être un de ces sous êtres, un humain. La colère monta en lui quand il réalisa ce que cet homme était en train de faire subir à son aimée.
Il sortit son épée de son fourreau et s’élança à travers la clairière, et ne cherchant plus à être discret, il hurla son cri de guerre afin de terroriser son adversaire et rassurer l’amie des animaux.

*


Le groupe de cinq hommes, mené par Klésias, était parti à la recherche de leur chef. Il avait décidé de laisser le gros de la troupe au campement, au cas où Gilnéor revienne. Il avait pris avec lui les quatre meilleurs combattants, de ceux qui connaissaient le guerrier au mouton flamboyant depuis son entrée dans l’armée.
Ils marchaient en arme à travers la forêt qui leur semblait hostile. Ils hurlaient le nom de leur commandant, fouillant les fourrés, cherchant celui qui savait si bien les mener et qui n’était pas rentré au camp.
Ils se figèrent en entendant un hurlement barbare puis se précipitèrent vers la source de cet appel.

*


Gilnéor roula sur le côté, entraînant Lealynn avec lui. L’épée se planta dans le sol juste là où ils se reposaient la seconde d’avant. D’un coup de pied, il fit tomber leur assaillant et se releva prestement, tenant sa belle compagne derrière lui afin de la protéger.

Jillen se releva, son épée à la main. Ses yeux injectés de sang, il observa son adversaire. Il semblait savoir se battre à mains nues et sans arme, contre un chasseur comme lui, il n’avait aucune chance. Il serra les dents et se jeta en avant, feintant puis tranchant.

Gilnéor esquiva et donna un coup d’épaule à son assaillant, lui laissant juste assez de temps pour se rappeler où se trouvait son épée. Il la chercha des yeux et la vit au pied du tronc d’arbre, trois mètres derrière l’elfe sauvage.

Lealynn hurla. Elle voulait que les deux mâles cessent de se battre, qu’elle puisse présenter son nouvel ami à son prétendant de toujours, que le sang ne soit pas versé. Elle ne comprenait pas ce qu’il se passait, juste qu’un des deux mourrait si cela continuait.

En entendant le deuxième cri, féminin celui-là, Klésias et ses compagnons forcèrent l’allure. Les racines et les branches semblaient vouloir les ralentir, ils coupaient ce qui gênait leur progression à grands coups d’épée.

Le chasseur se concentra sur son adversaire, oubliant tout ce qui se trouvait autour de lui. Il n’entendait plus le cri de son aimée, juste la respiration de cet être machiavélique et les battements de son propre cœur. Il porta un coup à la jambe et un autre au torse de l’humain.

Gilnéor, troublé par le cri de sa compagne d’une nuit, ne vit pas arriver les deux coups. L’acier entra dans sa chair comme dans du beurre, faisant couler deux traînées de sang. Il se mordit les lèvres et se força à se concentrer sur ce combat. D’un pas chassé, il commença à partir sur la droite de l’elfe sanguinaire, et au dernier moment sauta sur sa gauche, roulant au sol jusqu’à son épée. Une fois la garde de son arme dans sa main il se releva d’un bond, le visage crispé.

L’elfe aux longs cheveux dorés hurla une nouvelle fois quand son amant se fit blesser. Elle se précipita sur le chasseur, afin d’arrêter cette stupide boucherie mais il la repoussa violement, rageant de voir l’humain une arme entre les mains.
Les larmes aux yeux, elle exhorta Jillen d’arrêter mais celui-ci ne l’entendait plus.

L’acier étincela quand les deux lames se rencontrèrent. Chaque assaut était plus rude que le précédent. Les deux combattants savaient se battre, ils se tournaient autour, cherchant la faiblesse dans la défense adverse. Feinte, coup d’estoc, riposte, coup de taille… Des égratignures zébraient le corps de l’humain et le sang coulait de ses deux blessures au torse et à la jambe. Une large coupure avait défiguré l’elfe, de la bouche à l’oreille droite. Un rictus mauvais se dessinait sur ces lèvres. Son adversaire ne pourrait plus tenir longtemps à ce rythme. Le sang qu’il perdait commençait à rendre le sol glissant.

Gilnéor était conscient que si le combat durait il mourrait. Dans un éclair de lucidité, il porta un coup de taille, découvrant volontairement son flanc gauche. L’elfe en profita pour lui donner un coup qui aurait dû être mortel. Anticipant, l’humain se tourna légèrement, l’acier mordant sa chair sans lui causer de blessure trop importante. Il profita de ce moment, où son adversaire était tendu vers lui pour glisser sa lame dans un défaut de la cuirasse, sous les aisselles, là où le cuir ne le protégeait pas. Son épée glissa dans la chair du chasseur qui s’écroula sous le coup.
L’humain lâcha son arme et tomba à genoux près du corps sans vie de son assaillant. Les larmes aux yeux il découvrit le médaillon qu’il avait autour du cou, portant le symbole de la maison royale elfique.

Lealynn était prostrée contre le tronc d’arbre, là où elle avait connu le bonheur l’espace d’une nuit. Son visage ruisselait de larmes. Elle maudit l’impétuosité et la mort de Jillen, ce si brave chasseur qui n’avait, hélas, rien compris une fois de plus. Egoïstement, elle était heureuse de sa mort, ou plutôt de la victoire de cet humain qui avait su la rendre si heureuse.

Klésias et ses hommes pénétrèrent dans la clairière, les armes à la main, les sens en éveil. Gilnéor était là, nu, couvert de sang et de blessures, agenouillé devant le corps d’un elfe en armure. La plus belle femme qu’ils n’avaient jamais vue était assise non loin, nue elle aussi, tenant ses jambes dans ses bras, regardant le guerrier, un léger sourire triste sur ses lèvres.
Leur chef se releva, leur demandant de repartir, pour aller chercher une litière et des chevaux. Il leur assura que tout irait bien.

Une fois les combattant partis, il vint auprès de Lealynn, et la serra très fort dans ses bras. Elle l’aida tendrement à se laver, lui pansa ses blessures de ses mains si douces. Il sécha ses larmes de ses doigts épais. Ils s’habillèrent mutuellement, cherchant à retrouver un peu de ce qui avait été gâché par l’arrivée de Jillen.

*


C’est une troupe bien silencieuse qui se présenta devant la porte royale de la capitale elfe. Gilnéor était en tête, sans arme ni armure, sur son cheval bai. Lealynn se tenant à ses cotés, resplendissante sur un palefroi blanc. Ensuite venait la litière sur laquelle reposait Jillen, son épée posée sur son torse, la garde vers le visage et la lame pointant vers ses pieds. Il souriait dans la mort, comme heureux de ne plus être témoin de l’amour qui se lisait entre l’elfe et l’humain.
Les soldats de Gilnéor suivaient.

Le guerrier descendit de cheval. Sa magnifique compagne voulu faire de même, mais il l’arrêta d’une légère caresse sur l’avant bras. Il s’avança de quelques pas, regardant les portes closes.
Après une attente courte, mais qui leur parue à tous interminable, les portes s’ouvrirent. L’Autharphen Mielwinnen, connétable de l’armée elfe, parue sur sa licorne blanche, accompagnée de dix gardes d’élite dans leurs armures de mithril. Elle avança son cheval jusque devant l’humain et le toisa de son regard dur. Jillen était le fils de sa sœur et elle tenait à savoir ce qu’il s’était passé.
« Merci de nous recevoir Autharphen. Je suis Gilnéor, Commandant de la troisième compagnie de l’armée royale de Brouin.
Je suis venu en ces terres afin de préparer la venue de notre roi, pour qu’il puisse rencontrer votre dirigeant et sceller cette alliance que nos deux peuples attendent depuis si longtemps.
Hélas, l’heure n’est pas aux réjouissances comme je l’aurai voulu. J’ai tué, sans le chercher, cet elfe, un vaillant guerrier. Je sais que le sang appelle le sang. Mais je sais aussi que nous avons tous besoin de cette alliance. C’est pourquoi je me constitue votre prisonnier, prêt à accepter le châtiment que vous jugerez bon.
Je me dessaisis donc de mon commandement au profit de mon aide de camp, Klésias, qui pourra vous fournir tous les renseignements que vous voudrez concernant l’arrivée de notre roi. »

Lealynn blêmit sous ces paroles. Elle voulu ajouter quelque chose, mais le maintien fier de son amour l’en dissuada. Elle se promit d’intervenir auprès du conseil en sa faveur.

Mielwinnen donna l’ordre d’emmener Gilnéor dans la ville, pour qu’il puisse attendre sa sentence. Elle demanda à la jeune Lealynn de rentrer chez elle le plus rapidement possible afin de rassurer son père. Elle permit aux humains d’installer un campement non loin des murailles de la cité, assurant Klésias qu’elle ne tarderait pas à venir les rejoindre.
Enfin, elle descendit de cheval et s’approcha de la dépouille de son neveu. Laissant sa tristesse éclater, elle prit le mort dans ses bras et éclata en pleurs.

*
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MessageSujet: Re: Lealynn et Gilnéor, ou pourquoi l’Amour ne doit pas naître..   Lealynn et Gilnéor, ou pourquoi l’Amour ne doit pas naître.. EmptyJeu 22 Déc - 23:13

« Ceci n’augure rien de bon. » Les elfes autour de la table, tous de vénérables sages, opinèrent de la tête. Celui qui avait pris la parole était reconnu comme le plus sage d’entre eux. Et chacun savait qu’il ne parlait pas seulement de la mort de Jillen, une mort regrettable mais après tout, il était lui-même l’instrument de sa perte. Ils avaient entendu l’humain et Lealynn. Tous deux leur avaient raconté la même chose.
Et depuis que Gilnéor était retenu au sein de la cité, la belle elfe lui rendait visite le plus souvent possible, afin de soigner ses blessures disait-elle. Mais cela se voyait dans ses yeux quand elle parlait de lui. Elle l’aimait. Et lui aussi.
« Il faudrait trouver un moyen de les séparer… Loin des yeux loin du cœur. Et connaissant notre papillonneuse de Lealynn, elle ne tardera pas à l’oublier…
- Oui, envoyons-la dans les montagnes du nord, qu’elle commence le plus rapidement possible sa formation de prêtresse de la vie.
- Bonne idée ! Et demandons au roi Brouin de permettre à son commandant de rentrer chez lui, loin au sud, afin qu’il puisse profiter de sa retraite.
- Je ne sais pas si cela suffira…
- Il le faut, c’est la seule possibilité. Nous ne sommes pas des trolls. Nous ne pouvons demander sa mort alors qu’il n’a fait que se défendre.
- Laissons le temps faire son œuvre… »

Les anciens avaient parlé.

*


Gilnéor était assis au bord de son lit. Il ne comprenait rien. Il avait avoué le meurtre d’un des leurs, et tout ce que les elfes avaient prévu comme prison était une bâtisse confortable, dont la porte ne fermait pas à clef, aux grandes fenêtres. Presque un manoir dans son village natal. Et il n’y avait même pas de garde devant la porte. Il ne voyait personne à part sa tendre Lealynn qui venait lui apporter ses repas et changer ses pansements. Ils passaient de longs moments à parler, à se découvrir. Ils échangeaient aussi bien des paroles que des caresses, des idées et des promesses. Elle lui avait parlé de sa formation de prêtresse, qui ne durerait qu’un temps. Après, elle pourrait le rejoindre, dans son village et vivre avec lui. Ils auraient des enfants et un potager, et pourraient vivre leur amour sans retenue.

*


Lealynn était en route. Elle partait dans les montagnes, loin. Ses adieux avec Gilnéor avaient été déchirants. Cette dernière nuit, ils s’étaient aimés comme jamais, comme si ils ne devaient plus jamais se revoir. Leurs corps brûlants s’étaient fondus en une extase incroyable, leurs lèvres ne se rassasiant jamais du goût de l’autre.
Le rouge lui monta au visage alors qu’elle repensait à ce qu’il lui avait fait, à ce qu’elle s’était permis. Ses mains puissantes avaient parcouru tout son corps, sa langue curieuse en avait exploré tous les recoins. Elle s’était régalée de son odeur, avait aimé sentir son étreinte de plus en plus fébrile. Puis ils avaient explosé. Et ils avaient recommencé, plus doucement, plus tendrement… Et recommencé encore… Quand le soleil s’était levé, ils n’avaient toujours pas dormi.
Elle somnolait sur son cheval, se laissant guider par la bête placide.

*


Sa compagnie avait bénéficié d’une permission à l’arrivée du roi. Alors que le traité devait être signé le jour même, Gilnéor et ses soldats étaient en route pour leur capitale. Il avait été remercié de ses loyaux services et bénéficiait d’une solide pension, lui permettant de retourner vivre chez lui sans se soucier d’argent tout le reste de sa vie.
Il pensait à elle, ne répondant que rarement, par un hochement de tête, à l’enthousiasme de Klésias, nommé commandant à sa place. Il rentrait chez lui en héros mais avait un arrière-goût amer dans la bouche. Vivement qu’elle vienne le rejoindre. En attendant, il construirait leur doux nid d’amour.

*


Elle appela un oiseau. Il vint se poser sur son doigt tendu, ses petites serres s’agrippant sur sa peau tendre. Elle lui chanta son amour pour Gilnéor et lui demanda d’aller porter de ses nouvelles à son tendre amour.

*


Le rossignol volait dans le ciel. Il n’avait jamais quitté sa forêt natale. Il essayait de suivre les courants d’air afin d’économiser ses forces. C’est un rapace qui lui avait expliqué cela, un jour. L’aigle avait failli en faire son repas mais avait changé d’avis en humant le parfum de Lealynn sur lui. Il s’appliquait, pour aller le plus loin possible, pour réussir à suivre la piste de Gilnéor. Il avait un message à transmettre et aucun papillon, aussi appétissant soit-il, ne détournerait son attention.

*


Gilnéor s’étonna quand un oiseau vint s’écraser dans son assiette. L’animal avait l’air d’être à bout de force. Gentiment, il retira le rossignol de sa soupe et lui essuya les ailes avec sa serviette. L’oiseau le fixa de ses yeux mornes. Et d’un coup, il sembla retrouver sa vigueur. Il se piqueta les plumes avec son bec, pour se faire le plus beau possible, et, se dressant sur ses deux pattes, il releva la tête.
Un son cristallin sorti du petit bec, il chantonna un air que Gilnéor connaissait depuis très longtemps. Puis un autre qu’il avait appris peu de temps auparavant. Et enfin, il sifflota une mélodie des plus pures. Cette dernière, l’humain ne la connaissait pas. Mais son cœur reconnu le chant de son amour.
Il donna des miettes de pain au petit volatile, lui présenta son verre empli d’eau. Puis il lui chuchota : « Je sais que je te demande beaucoup, mais dis lui que je l’aime, que je pense à elle et qu’elle me manque énormément. »
L’oiseau le regarda puis une fois rassasié prit son envol.

*


Twegwean observait la silhouette qui avançait d’un pas sûr malgré le sentier rocailleux rendu glissant par la neige. Ni le froid ni les bourrasques de vent ne semblaient gêner son visiteur. Ou plutôt sa visiteuse. Le Cercle des Anciens de Lillowen l’avait prévenu. Ils envoyaient une jeune elfe afin qu’elle devienne prêtresse de la Vie. Il voyait rarement des visiteurs ici, en haut de la Montagne Sacrée. Et encore moins de postulants. Depuis qu’il était devenu le Grand Ordonnateur, il y avait plus d’un millénaire de cela, il n’avait formé que trois disciples. Et sur les trois, deux seulement avaient fini leur formation.
C’était la deuxième fois que la cité royale envoyait un postulant. Le premier, près de neuf cent ans auparavant, n’était même pas arrivé au sommet de la montagne. Certains elfes étaient doués pour manier les forces magiques, d’autres pour les arts, d’autres encore pour chasser, cuisiner ou manier l’épée. Mais pour devenir servant de la Vie, il fallait une multitude de dons. Et nul ne savait au début d’une formation ce qui en éclorait.
Enfin elle arriva devant lui, menant son cheval par la bride. L’animal, malgré ses yeux emplis de peur avait confiance en elle. Et ce qu’on avait dit à l’ancien à propos de la beauté de la jeune elfe était très loin de la vérité. Elle s’inclina gracieusement malgré son lourd et épais manteau de fourrure et c’est avec un merveilleux sourire qu’elle se présenta : « Bonjour, je suis Lealynn, fille d’Elowan.
- Tu es désormais Lealynn, fille de la Vie. Bienvenue à toi. » Il désigna un bâtiment de bois situé sur sa gauche, puis la grotte fermée par un ensemble de rondins et de tentures lourdes. « Voici l’étable, où tu pourras soigner et nourrir ton compagnon. Ensuite tu me rejoindras, je vais préparer de la soupe chaude. »
Elle acquiesça de la tête avant de s’exécuter.

*


« Père ! Père ! Un voyageur arrive ! » L’enfant, âgé de sept ou huit ans courrait le long du chemin qui serpentait entre les champs. Son père le regarda en souriant « Alors ne reste pas planté là ! File vite au village que l’on prépare un banquet afin qu’il sache que chez nous les voyageurs sont les bienvenus !
- Oui, j’y vais ! »
Après avoir regardé son fils repartir à toute vitesse, Klagen mit sa main en visière devant ses yeux et scruta le paysage au loin. Un seul cavalier, qui ne se pressait pas. Il prit sa bêche sur son épaule et rentra au village en sifflotant. Le voyageur apportait peut-être des nouvelles de son frère et de ses trois compagnons, partis plus de douze ans auparavant faire la guerre dans de lointaines contrées. De temps en temps, un voyageur s’arrêtait chez eux et sans cesse ils le pressaient de questions, si il les connaissait, si il portait de leurs nouvelles. Les premiers temps, rien… Mais au cours des cinq dernières années, tous reconnaissaient le nom de Gilnéor, pour le plus grand bonheur de sa mère. Le jeune paysan qui avait quitté le village était devenu, au fur et à mesure des campagnes guerrières, le commandant d’une compagnie de l’armée royale.

*


La couche de neige était épaisse, Lealynn s’enfonçait à chaque pas de dix centimètres. Elle venait d’étriller et de nourrir son cheval. Elle se dirigeait vers la grotte, ne sachant à quoi s’attendre à l’intérieur. A quoi pouvait ressembler l’antre du Grand Ordonnateur ? Elle imaginait une grotte immense recouverte de glace éternelle, des stalactites et stalagmites se rejoignant en d’immenses piliers translucides. Un plafond si haut qu’on ne pouvait l’apercevoir, des esprits se matérialisant parfois pour chuchoter leur sagesse à ceux qui avaient le droit de les entendre.
Elle hésita devant la lourde tenture. Et si les esprits la jugeaient indigne de leur confiance ? Et si elle était foudroyée en posant les yeux sur ce saint des saints ? Le sourire de Gilnéor, quand il lui avait dit de lui revenir vite, lui redonna confiance. Lentement, elle tira le rideau de cuir et pénétra dans l’antre.
Un feu crépitait au milieu de la petite grotte, éclairant de lueurs mouvantes un désordre sans pareil. Des fourrures gisaient au sol, couvertes de livres et d’ustensiles variés. Là un luth, ici un bol contenant une substance solidifiée par le temps et un mortier, des fleurs séchées étaient éparpillées un peu n’importe comment. Des pierres précieuses renvoyaient l’éclat du feu de leurs mille facettes. Un lame brisée attendait patiemment près de ce qui semblait être une petite forge. L’odeur de mâle et la chaleur étouffante du lieu, après la fraîcheur et la pureté de la montagne, la mirent mal à l’aise.
Heureusement, un fumet appétissant vint lui chatouiller les narines, s’échappant de la marmite dont Twegwean remuait le contenu à l’aide d’une grosse louche. La faim vainquit son impression première et elle entra, essayant de ne rien écraser. Bouche bée, elle parcourue la pièce du regard, de la litière faite de peau et de paille dans un coin, à la bibliothèque surchargée en passant par l’elfe sensé être empli de sagesse qui la regardait d’un air narquois.
« Et bien, ne reste pas plantée là debout comme une belle plante que tu es ! Prends un tabouret et assieds toi ! L’apparence n’est pas tout dans la vie. Regarde bien autour de toi. Ce qui te semble désordre n’est à mes yeux qu’une façon de ranger. La vie est pareille. Elle semble parfois décousue. Mais il y a une raison à toute chose. Et ce qui peut te sembler désordonné est en fait ordonné pour d’autres. » L’elfe sans âge éclata de rire devant le visage empourpré de Lealynn. « Voici donc ta première leçon ! Prends ce bol, tu as besoin de manger. Ce n’est pas la nourriture fine à laquelle tu es habituée, mais cela tient au corps et te réchauffera jusqu’au fin fond de tes entrailles. »

*
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MessageSujet: Re: Lealynn et Gilnéor, ou pourquoi l’Amour ne doit pas naître..   Lealynn et Gilnéor, ou pourquoi l’Amour ne doit pas naître.. EmptyJeu 22 Déc - 23:14

Gilnéor descendit de cheval, les larmes aux yeux. Cela faisait plus de douze ans qu’il avait quitté cet endroit. Un banquet était préparé. Savaient-ils tous que c’était lui, qu’il était revenu ? Les villageois le regardaient, inquisiteurs mais confiants. Sa tenue, brodée de perles et d’argent, faisait leur admiration.
Un homme, âgé de vingt-cinq ans environ, s’avança vers lui.
« Bienvenue à toi voyageur, je suis Klagen, fils de Kléria. Je parle au nom de notre Ancien, Jurnick. Il s’excuse de ne pas être présent, mais une longue maladie le cloue au lit. Mangeons et parlons, nous sommes toujours curieux d’avoir des nouvelles du monde ! »
Le guerrier au mouton flamboyant se jeta dans les bras de Klagen, un grand sourire aux lèvres. « Mon frère ! Cela fait si longtemps ! Quand je suis parti, tu n’étais à peine plus qu’un enfant !
- Gilnéor ?! » Klagen avait la voix tremblotante, il n’en croyait pas ses oreilles. Ce noble voyageur, à la carrure de guerrier, aux vêtements de prince, était son frère enfin revenu.
Des cris de joie éclatèrent parmi les paysans, saluant celui qui était enfin revenu.
Kléria se jeta dans les bras de son fils, heureuse enfin de le revoir. « Comme tu as changé mon fils ! Nous avions de tes nouvelles par les voyageurs, parfois, mais te serrer dans mes bras, je n’y croyait plus ! Viens, Jurnick sera fier de te revoir, toi qui a porté les couleurs de notre village jusqu’en haut de l’armée ! »
Tout en étant emmené vers la masure qui servait d’habitation au chef du village, Gilnéor saluait chacun, essayant de répondre à leurs questions à tous. Ils étaient si curieux de la vie ailleurs, si contents de le revoir. Cela lui faisait chaud au cœur. Il avait hâte de leur présenter à tous sa tendre Lealynn.

*


Tous les matins, Gilnéor s’asseyait sur le même rocher à l’extérieur du village et regardait le soleil se lever.
Tous les matins, un petit oiseau venait se poser sur son épaule et lui contait des mots d’amour à l’oreille. Il l’écoutait attentivement et lui répondait avec son cœur. Puis l’oiseau repartait et Gilnéor se mettait au travail.
Il avait fait venir des bois rares de la lointaine jungle de Strangleronce et des pierres taillées des carrières de Grim Batol. Il bâtissait seul ce nid d’amour dans lequel il pourrait accueillir son aimée. Il avait creusé les fondations et, patiemment, pierre par pierre, il élevait les murs.
Son dos commençait à protester contre pareil traitement mais il n’en n’avait cure. Il voulait que cette maison soit finie quand Lealynn reviendrait des montagnes du Nord. Et tout en travaillant, il pensait à elle, aux moments qu’ils avaient vécu tous les deux et au futur souriant qui les attendait.

*


Tous les soirs, Lealynn montait en haut de cette butte enneigée, à quelques pas de la grotte, et regardait le soleil se coucher.
Tous les soirs, un petit oiseau venait se poser sur son épaule et elle lui contait ses mots d’amour pour Gilnéor. Il l’écoutait attentivement puis repartait, bravant le froid et les dangers pour transmettre son message. Alors elle se relevait et retournait voir son maître pour continuer sa formation.
Elle faisait d’immenses progrès, à une vitesse qui sidérait Twegwean. Elle avait hâte que ceci se termine, et mettait dans son apprentissage toute sa volonté, pour pouvoir rejoindre son tendre le plus vite possible et enfin se réfugier dans ses bras.

*


S’aidant de sa canne, marchant tout doucement, Kléria était venue rendre visite à son fils. Quand il l’avait vue, il avait laissé la charpente qu’il montait pour venir partager ce repas avec elle. La viande de busard était agrémentée d’une sauce au brie de Stormwind et un excellent pinot noir venait se marier avec délice au plat.
Kléria leva le seul œil qui lui permettait désormais de voir et fixa son fils.
« Gilnéor…
- Oui Mère ?
- Pourquoi t’obstines-tu ? Quand tu es revenu parmi nous, toutes les filles du village te regardaient avec envie et ne rêvaient que de se marier avec toi. Mais tu ne leur parlais que de cette elfe ! Tout le monde t’admirait et écoutait avec envie tes voyages et les guerres que tu avais vécues. Sais-tu ce que les gens disent de toi maintenant ?
- Non Mère, et peu importe. Lealynn ne tardera plus et notre maison n’est pas encore prête.
- Ils disent que tu as reçu un coup de trop sur la caboche ! Et je ne suis pas loin de les croire ! Te rends-tu compte que cela fait dix ans que tu nous racontes la même chose ? Elle ne viendra pas. Elle se joue de toi.
Je sais que Dana rêve toujours de toi… Marie-toi avec et fais lui de beaux enfants !
- Mère, j’aime Lealynn et je sais qu’elle viendra, répondit l’ancien guerrier un sourire patient aux lèvres. »

*


Twegwean leva les yeux vers Lealynn et la fixa longuement. Elle sortit de sa transe et ses yeux croisèrent ceux de l’elfe millénaire.
« Oui Maître ?
- Dis moi Servante de la Vie, qu’as-tu appris durant ces années qui se sont écoulées ? »
La jeune elfe se sentit mal à l’aise. Sous ce regard perçant et ces termes polis, elle sentait que sa réponse pouvait être le tournant de sa formation.
« Et bien… Comment dire ? Je ressens la vie avec plus d’acuité encore qu’avant de venir vous rejoindre. Les animaux, mes amis, me parlent toujours, mais je les comprends mieux qu’auparavant. Et je sens la vie en toutes choses. Le feu me parle en crépitant, il me conte parfois de doux mots, d’autres fois il me menace. Il saute toujours d’un extrême à l’autre.
L’eau par contre est toujours tranquille. Même quand elle gronde, elle continue à apporter la vie où elle passe.
L’air me chuchote ce qu’il se passe à plusieurs lieues de là. Il m’apporte les mélodies que découvrent les habitants du dernier village avant la montagne sacrée.
Quand à la terre, elle me décrit ce qu’il s’est passé, soit quelques temps auparavant, parfois ce dont elle a été témoin il y a plusieurs siècles.
Par exemple, ce rocher sur lequel vous êtes appuyé m’a déjà parlé d’une certaine Melulyn. Vous la connaissez ?
- Petite insolente, va ! » Le grand Ordonnateur éclata de rire et se déplaça dans la grotte jusqu’à la bibliothèque. Il en sortit un parchemin et vint jusqu’à la table à laquelle était assise Lealynn. Il posa la feuille sur la table.
L’amie des animaux fût étonnée en découvrant une carte détaillée de sa région de naissance.
« Imagine que tu es là, à Lillowen. Et que tu veux te rendre ici, dans le village de Thallas. Tu porte un remède que t’ont donné les anciens de la capitale, pour sauver la vie du roi. Bref, tu n’as pas de temps à perdre. Comment t’y prends-tu ? »
Elle réfléchit un peu devant le parchemin puis suivit de son doigt les routes de la capitale au village.
« Je passerais par là.
- Il y a plus rapide.
- En allant tout droit, mais la forêt, les cours d’eau, les fossés et les buttes me retarderaient.
- Oui, oui… » Le sage prit un air agacé. « Mais là n’est pas la solution. Je te laisse cogiter. Prends le temps qu’il te faudra. Certains ont mis plus d’un siècle pour comprendre. »
Il sortit de la grotte, laissant la jeune servante dans le plus profond désarroi devant ces dernières paroles.

*


Le vent soufflait sur son visage. Son cheval le menait à toute allure à travers les terres trolls. Il fallait qu’il arrive à temps pour sauver Lealynn. Elle avait été capturée par la tribu Zan’Dallar et il était désormais le seul à pouvoir la sauver.
« Commandant ! Commandant Gilnéor ! »

Le ton impératif de la jeune voix le sortit du sommeil. Il avait rêvé, encore. Bien évidement, il n’était plus en état de monter à cheval. Et encore moins de porter les armes. Il se leva et alla ouvrir à son visiteur. Il sourit en reconnaissant le petit-fils de son frère.
« Bonjour à toi Décarius.
- Oh Commandant ! J’ai eu si peur. Vous ne répondiez pas.
- Allons, que peut-il arriver à un commandant de l’armée royale ?
- Je ne sais pas… » L’enfant mis un doigt sur ses lèvres pour s’aider à réfléchir puis répondit avec un grand sourire.
« Que votre elfe soit arrivée !
- Héhé, il est vrai que ce serait la meilleure chose au monde ! Et elle serait enchantée de rencontrer mon fier petit neveu. Aller, viens avec moi, nous avons un fauteuil à finir de sculpter.
- Oui ! Et vous me raconterez encore vos batailles ! Et un jour, je serais un grand commandant moi aussi, fier de porter le blason au mouton flamboyant ! »

Glinéor prit l’enfant de 8 ans par l’épaule et le mena dans la grande salle de la maison. Depuis la mort de Kléria, il n’y avait plus que ce petit pour lui rendre visite. Nul paysan ne venait plus, ils avaient tous peur du fou, comme ils l’appelaient. Son frère lui-même, devenu chef du village, ne se risquait plus jusque là, de peur que le prestige de son poste n’en soit amoindri. Mais d’après le petit, il était content d’avoir de ses nouvelles.

*


Dans le ciel, la lune jouait à cache-cache avec les nuages. Ses rayons se reflétaient sur la neige immaculée.
De la buée s’échappait d’entre les lèvres de Lealynn. Elle se baignait dans l’étang glacé. Elle aurait facilement pu demander à l’eau d’augmenter sa température, mais elle préférait ne pas troubler l’ordre de la Vie. Elle pensait à Gilnéor et cela lui suffisait pour se réchauffer l’âme, le cœur et le corps. Cela faisait longtemps, mais elle savait qu’il l’attendait. Comme elle aurait aimé être dans ses bras, là-bas, dans ce nid d’amour qu’il façonnait pour eux deux. Si seulement elle pouvait tordre l’espace et le retrouver… Tordre l’espace ?
Elle se précipita hors de l’eau, des gouttelettes dégoulinant le long de son corps nu. Fébrilement, elle fouilla dans ses affaires et en sorti la carte. Mais oui ! C’était cela !
Elle s’ébroua rapidement et enfila ses vêtements sur son corps à peine sec. Elle courut ensuite jusqu’à la grotte.
« Maître, Maître, j’ai trouvé ! »

Twegwean regarda la jeune elfe entrer, un sourire aux lèvres.
« Qu’as-tu trouvé mon enfant ?
- Regardez ! »
Elle posa de ses mains tremblantes d’excitation le parchemin sur la table.
« Le plus rapide pour aller d’ici à là, pour apporter le remède des anciens au roi, c’est de faire ainsi… »
La servante de la Vie plia la feuille de telle manière que Lillowen et le village de Thallas se retrouve côte à côte.
« Il ne me suffit plus qu’à faire un pas et j’y suis. Ensuite, je laisse la nature reprendre sa forme originelle afin que rien ni personne n’en souffre. »
Le sage en était stupéfait. Elle avait compris, et plus vite que lui-même à l’époque. Lealynn était rayonnante devant le visage surpris de son mentor.
« Bien. C’est là le principe, oui. Il faut cependant faire attention. Si tu sautes ainsi à un endroit où se trouve autre chose, la mort te paraîtra douce quand elle viendra te cueillir. C’est pourquoi il faut auparavant observer avec tous tes sens l’endroit où tu veux te rendre. De plus, c’est un effort qui demande énormément de pouvoir, d’autant plus si l’endroit est très éloigné. Il ne faut pas l’utiliser à la légère. »

*
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MessageSujet: Re: Lealynn et Gilnéor, ou pourquoi l’Amour ne doit pas naître..   Lealynn et Gilnéor, ou pourquoi l’Amour ne doit pas naître.. EmptyJeu 22 Déc - 23:14

Les larmes ruisselaient sur son visage sale. Les yeux embués, il regardait la pièce où il se trouvait. Le prêtre de la Lumière venait de sortir, fuyant cette maison maudite. Son grand-oncle se mourrait.
L’adolescent l’avait trouvé allongé sur le sol trois jours auparavant. Gilnéor répétait sans cesse le nom de son aimée. Décarius l’avait alors couché dans ce grand lit qu’il l’avait aidé à bâtir et était parti chercher le guérisseur. Ce dernier avait annoncé tranquillement que la vie de l’ancien héros allait s’arrêter et que cela permettrait d’en finir avec cette folie.
Décarius avait alors volé un cheval à son père et était parti chercher un prêtre. Il avait chevauché à grande allure jusqu’à la ville lointaine et avait convaincu, non sans peine, le frère Niemetz de venir avec lui.
Le jugement du saint homme avait été sans appel. Il avait prononcé une dernière prière pour l’ancien soldat et était reparti.

*


« Je dois le faire ! Je dois y aller ! Cela fait trois nuits que je n’ai plus de nouvelles. J’ai tout d’abord pensé que le premier oiseau s’était perdu, que le deuxième s’était fait manger, c’est le cycle de la vie. Mais trois, non ! Il se passe quelque chose de grave, mon cœur me le dit !
- Tu es trop jeune, trop inexpérimentée pour y arriver. De plus nos pouvoirs n’ont pas pour vocation d’être utilisés à des fins personnelles. Je te l’interdis ! »
Lealynn sortit de la grotte furieuse. Elle courut jusqu’à sa butte et laissa les larmes l’envahir. Prenant une grande inspiration, elle demanda à l’air de lui décrire cette maison, à la terre de la guider dans l’immensité, à la lune de veiller sur son voyage. Puis elle plia l’espace et se projeta.

*


Décarius pleurait. Son grand-oncle n’en cessait plus d’appeler Lealynn, d’une voix de plus en plus faible.

*


Twegwean sentit la brèche s’ouvrir puis se refermer.

*


Gilnéor était allongé dans son lit. Du bel homme, il ne restait plus qu’un vieillard ratatiné. Ses cheveux, d’un jaune sale, se faisaient rares sur son crâne couvert de taches de vieillesse. Il n’avait plus que la peau, fripée, sur les os. Son corps était fatigué après une dure vie faite de combats et de labeur.
Il ne cessait de répéter le nom de son aimée, en souriant. Ses lèvres entrouvertes laissaient apparaître une mâchoire édentée. Ses paroles se faisaient de plus en plus inaudibles, son ultime combat puisant ses dernières forces.

Lealynn apparut devant les yeux ébahis de Décarius. Le temps l’avait rendu encore plus belle. Ses longs cheveux dorés cascadaient le long de son dos, soulignant les courbures sensuelles de son corps. Son visage rayonnait. Elle avait réussi, elle était là.

Leurs yeux se croisèrent, emplis d’amour l’un pour l’autre. Gilnéor prononça une dernière fois le nom de son Amour et ses paupières se fermèrent paisiblement. Lealynn, réalisant la situation, hurla et se jeta sur le lit, en pleurs.




Voilà pourquoi les elfes et les humains ne doivent s’aimer. Le Temps fait son œuvre et nulle force ne peut le combattre. Les humains ont une vie si courte, et les elfes si longue que tout amour entre les deux ne peut finir qu’ainsi.



FIN


Phalenopsis pleurait. Que cette Légende était triste… Il se leva d’un pas chancelant et sortit de la librairie, le vieux recueil sous le bras, sans jeter un regard au vieil homme.
Ses pas le menèrent le long des canaux, où il resta longtemps immobile à contempler le reflet du soleil dans l’eau.
« Quelle tristesse que cet amour si pur se finisse ainsi… »
Puis, d’un coup, une idée lui vint et éclaira son visage.
Il rouvrit le livre et contempla les trois pages blanches entre la fin de la première légende et le début de la deuxième.
« Nalwyn et Zaeck me disent barde. Et n’est-ce pas l’apanage des bardes que de pouvoir faire en sorte que les légendes se finissent bien ou mal ? »
Il prit alors sa plume et raya le mot « fin ». Puis il se mit à noircir de sa plus belle écriture ces pages immaculées.



Lealynn agrippa le corps de l’ancien guerrier et insuffla la Vie à l’intérieur comme elle avait vu Twegwean le faire un jour pour refermer la blessure d’un animal mourrant.

Décarius n’en croyait pas ses yeux. La plus belle créature qu’il ait jamais vue se tenait sur le lit de mort de son grand oncle et une lueur dorée se déversait de l’elfe vers le vieillard.

Le combat entre Lealynn et la Mort était inégal. La première était douée mais inexpérimentée, fatiguée par l’effort qu’elle avait du fournir pour arriver ici. La deuxième avait derrière elle une éternité d’expérience, et l’ordre de la Vie avec elle.

*


Le grand Ordonnateur, de sa grotte, percevait ce combat. Il sentait, comme il l’avait ressenti durant la formation de la belle elfe, l’Amour qui la liait à cet humain.
Silencieusement, en pleurant, il souffla le feu intérieur de Lealynn comme si il s’agissait d’une simple bougie. Il invoqua alors la Mort et lui imposa de prendre la vie de son apprentie, afin que l’Amour de Gilnéor et de Lealynn puisse s’accomplir éternellement dans l’autre monde.

FIN


Le druide relut ses lignes en souriant. Cette fin était certes triste, mais ils étaient enfin réunis, et c’est ce qui comptait avant toute chose.

***

Loin, très loin de là, en haut de sa montagne enneigée, un vieil elfe étrange souriait.
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Elanora
Lumineuse
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MessageSujet: Re: Lealynn et Gilnéor, ou pourquoi l’Amour ne doit pas naître..   Lealynn et Gilnéor, ou pourquoi l’Amour ne doit pas naître.. EmptyJeu 22 Déc - 23:38

Page 13 ... c'est du tout bon ca encore ... même si au début ca enchaine un peu trop rapidement :p
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Phalenopsis
Gros nounours
Phalenopsis


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MessageSujet: Re: Lealynn et Gilnéor, ou pourquoi l’Amour ne doit pas naître..   Lealynn et Gilnéor, ou pourquoi l’Amour ne doit pas naître.. EmptyJeu 22 Déc - 23:45

oui, mais toi tu triches, tu l'as eu avant les autres :p

quand tu parles du début qui enchaine un peu trop rapidement, c'est à quel niveau ?
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Elanora
Lumineuse
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MessageSujet: Re: Lealynn et Gilnéor, ou pourquoi l’Amour ne doit pas naître..   Lealynn et Gilnéor, ou pourquoi l’Amour ne doit pas naître.. EmptyVen 23 Déc - 0:13

Entre les mini chapitre, notament les dix ans d un coup.
Masi ca reste un avis perso^^
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Teelah
Copine à Lapinou
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MessageSujet: Re: Lealynn et Gilnéor, ou pourquoi l’Amour ne doit pas naître..   Lealynn et Gilnéor, ou pourquoi l’Amour ne doit pas naître.. EmptyVen 23 Déc - 0:55

Je préviens, si ça fait pleurer je lis pas ! study

Edit : ah bah voilà, je pleure ! crying
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MessageSujet: Re: Lealynn et Gilnéor, ou pourquoi l’Amour ne doit pas naître..   Lealynn et Gilnéor, ou pourquoi l’Amour ne doit pas naître.. EmptyVen 23 Déc - 2:41

(hrp : Bonsoir à tous, je me suis permis de m'inscrire pour répondre à ce message)

La druide regardait Phalenopsis, les yeux remplis de larmes. Et ne sachant que faire se serra contre lui de toutes ses forces.

Quelle belle histoire.

(hrp: Rien à dire... comme toujours j'adore ton style impeccable et l'histoire me fait réellement pleurer... c'est beau, simple et efficace.)
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nalwyn
Guerrière légendaire
Guerrière légendaire
nalwyn


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MessageSujet: Re: Lealynn et Gilnéor, ou pourquoi l’Amour ne doit pas naître..   Lealynn et Gilnéor, ou pourquoi l’Amour ne doit pas naître.. EmptyVen 23 Déc - 11:45

merci le Barde... pour l'histoire *sourit* et pour la fin ,...que tu as réécrite.. même si bien souvent les choses se passent différemment *soupire , le regard perdu dans le lointain*...une note d'espoir tout de même, qui fait avancer ...
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Selir
Lolesque
Selir


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MessageSujet: Re: Lealynn et Gilnéor, ou pourquoi l’Amour ne doit pas naître..   Lealynn et Gilnéor, ou pourquoi l’Amour ne doit pas naître.. EmptyMer 28 Déc - 16:00

voila je viens de finir l'histoire
enfin je viens de finir de la lire
je la trouve tres belle et triste.
j'aime bien la deuxieme fin
enfin, moi je dis faut trouver un editeur ^^ hehe
non franchement c'est super, j'aimerai avoir le meme talent.
félicitation

A vi Joyeux Noel et Bonne Annee a tous le monde
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MessageSujet: Re: Lealynn et Gilnéor, ou pourquoi l’Amour ne doit pas naître..   Lealynn et Gilnéor, ou pourquoi l’Amour ne doit pas naître.. Empty

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